Je vous propose aujourd'hui une légende bretonne
Avec le marque-page de mars du calendrier envoyé par MITOU
Et comme le marque-page de juillet est sur le même thème et que je ne publie pas en juillet, je le joins à cet article
Les marque-pages ne sont pas nommés, mais d'après le phare, j'ai reconnu le port de Doëlan, dans le Finistère.
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Merci Mitou ! |
L'Homme à la Barque
Comment
est mort l’Homme à la Barque, il
n'y a pas beaucoup de gens qui seraient capables de vous le conter...
...En
ce temps‑là, dit‑on, il ne restait
plus qu'une barque entre Penhors et La Torche, et cette barque était
la sienne. Ne me demandez pas comment avaient disparu les autres, le
fond de la mer doit en savoir quelque chose. L'Homme à la
Barque pêchait tout seul dans la baie, à l'écart des flottilles de
Penmarc'h ou d'Audierne. Ce n'était pas un homme sauvage, mais il avait
sa tête à lui et personne n'a jamais réussi à savoir ce
qui se passait dans cette tête‑là. Personne, et surtout pas sa
femme, une noiraude taciturne qui écorchait deux ou trois champs pelés
sur la palud, derrière le cordon de galets sonores, pour
avoir quelques pommes de terre à mettre autour de son poisson.
Lui,
ne vivait que pour la mer et n'avait de soin que pour sa barque. Jamais
ses mains ne s'occupèrent d'autre chose que du mât, de
la voile et de la coque. Peut‑être même n'avait‑il aucun souci de la
pêche, car il lui arrivait assez souvent de laisser ses filets au sec
et, ces jours‑là, les pommes de terre devaient se passer
de poisson. Au reste, la part de sa femme et la sienne étaient si
bien séparées que l'Homme à la Barque n'aurait pas daigné donner un coup
de bêche ou aller autour de la vache, dans les années
grasses où il y en avait une dans l'étable.
La femme, de son côté,
ne portait jamais ses pieds nus plus bas que la ligne de goémons qui
marquait la limite de la haute mer, son mari lui ayant
déclaré, une fois pour toutes, qu'un marin de bonne race devait
parvenir jusque‑là par ses propres forces avant de demander l'aide des
paysans. Telle était la coutume des
Anciens.
Et
c'est pour respecter cette coutume que
mourut l'Homme à la Barque, devenu déjà vieux et plus intraitable
que jamais. Une nuit de septembre, un grand navire s'en vint donner,
toutes voiles dehors, sur les rochers au large de Penmarc'h.
Le vent était si fort que les huniers et les perroquets furent
arrachés et emportés à plus d'une lieue dans les terres où les paysans
s'en firent de bien rudes
chemises.
L'Homme
battait la côte comme il faisait
à chaque fois que se levait la tempête. Avec mille peines, il
parvint à pousser sa barque dans les vagues. Le premier, il atteignit le
navire démantelé. Il lutta toute la nuit pour sauver les
âmes en perdition. Quand parut l'aube, après six va‑et‑vient, il
avait ramené dix‑sept naufragés au port de Saint‑Guénolé.
Sans mot dire,
il reprit la mer et mit le cap sur sa maison dont le
pignon blanchi luisait sur la palud. Quand la barque s'échoua sur la
grève, il s'évanouit de fatigue mortelle. C'était marée basse. Le flux
ranima le pauvre bougre. Il sortit de sa barque et se
traîna sur les genoux vers le cordon de galets. Mais il ne trouvait
plus sa respiration et la mer gagnait sur lui, de plus en plus forte.
Là‑bas, derrière la ligne de goémons, sa femme
l'attendait, raide debout, tricotant un bas de laine. Il fallait
qu'il arrivât par ses propres forces. Mais les vagues, maintenant, lui
crevaient sur les épaules, le renversant à chaque fois. Il
eut encore le temps de voir sa barque folle passer devant lui sans
dire adieu, il entendit le bruit que fit la quille en heurtant le
dernier rocher. Alors, il se laissa aller. Quand il fut avalé
par la mer, à trente pas devant elle, la tricoteuse ramassa son
ouvrage et s'assit sur les galets pour chanter le Libera.
Plus
tard, la veuve éleva de ses mains
une soue pour un petit cochon. Elle voulait avoir un peu de lard
salé pour engraisser ses pommes de terre. Et c'est la barque qui servit
de toit pour la soue. Dès lors, la petite ferme fut appelée La-Barque-de-L'Homme. Et ce fut toute la différence.
Livre "Contes bretons" de Pierre-Jakez Hélias
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Pors Carn à Penmarc'h |
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Et à Concarneau |