le grain de riz

Quelques marque-pages de menus que LAURE m'avait envoyés

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Merci Laure !

                                      Le grain de riz

Il était une fois un jeune homme qui était très pauvre. C'était le 31 décembre, et d'habitude, ce jour-là on fait un bon repas.

Il s'est dit: "Qu'est-ce que je vais bien pouvoir manger ? Qu'est-ce que j'ai dans ma cuisine ?"

Il va dans sa cuisine, il ne lui restait plus rien : pas de pommes de terre, pas de spaghettis, pas de couscous, pas de haricots, pas de pain, pas de sucre, pas de chocolat, pas de lait, rien, rien, rien. 
Il avait une vieille table en bois, il tire le tiroir de la table et là, qu'est-ce qu'il trouve, coincé dans une fente du tiroir ? Un grain de riz.

Il se dit : "Je vais manger ce grain de riz. ça vaut mieux que de ne rien manger du tout. Je vais le faire cuire, ça me fera passer le temps, et quand il sera cuit, je le sucerai lentement, lentement."

Mais pour faire cuire son riz, il lui fallait une casserole. Il était tellement pauvre qu'il n'avait plus de casserole, il avait déjà vendu toute sa vaisselle. Il va trouver son voisin.

"Tu veux me prêter une casserole ? J'ai du riz à faire cuire pour ce soir."
"D'accord, dit son voisin. Laquelle veux-tu, la petite ou la grande ?"

"Moi on m'a dit, pour faire cuire le riz, pour qu'il ne colle pas, il faut le cuire dans beaucoup d'eau. Donne-moi donc la grande casserole."

Le voisin se dit : "Il doit avoir beaucoup de riz, moi j'ai la flemme de me faire à manger ce soir, je viendrais bien manger avec lui."

"D'accord, je te prête la casserole, mais ce soir, je viens manger avec toi."

"D'accord, quand y en a pour un, y en a pour deux."

Pour faire cuire le riz, il fallait mettre de l'eau dans la casserole. Il n'en avait pas, car à cette époque, il n'y avait pas l'eau courante dans les maisons. Il fallait aller chercher l'eau à la fontaine, c'était à huit cents mètres, c'était l'hiver, il faisait froid.

"La voisine, elle va bien me prêter un peu d'eau."

Elle lui répond : "D'accord, mais je me suis donnée du mal pour aller à la fontaine, je te passe de l'eau, mais je viendrai manger avec vous."

"D'accord, quand y en a pour deux, y en a pour trois."

Pour faire cuire le riz, il fallait faire du feu, avec du bois, du papier et des allumettes. Il n'en avait pas. Pierre lui a passé du bois, Jacques des allumettes, et Michel du papier.
Chaque fois qu'il empruntait quelque chose, ils ont dit : "D'accord, mais on vient avec vous."

"D'accord, quand y en a pour trois, y en a pour quatre...pour cinq...pour six."

Du coup il avait tout ce qu'il fallait, mais un seul grain de riz.

"Comment je vais faire ce soir pour partager le grain de riz en six ? Ou alors on le suce chacun notre tour." Il réfléchit, il réfléchit.

Tout à coup, il a une idée. Dans le village, il y avait un fermier qui élevait des poules.
Il lui dit : "Ce soir, on est six à manger du riz. Toi tu es tout seul, tu dois t'ennuyer. Si tu as envie de venir manger avec nous, tu seras le bienvenu. Mais on est des pauvres gens, on mange le riz sec, sans viande. Toi tu mangerais le riz avec une poule par exemple."

Le fermier dit : "Je viens manger votre riz, mais je ne vais pas venir les mains vides, c'est normal que j'apporte quelque chose. Tiens, prends cette petite poule grasse qui est là."

Le garçon a pris la poule, il est content, il vaut mieux manger une poule à sept que manger un seul grain de riz à six.

Dans le village, il y avait une vieille qui élevait des dindes. Il va la trouver : "Ce soir, on est sept à manger une poule au riz. Si tu as envie de venir manger avec nous, tu seras la bienvenue. On aura une poule pour huit, c'est pas aussi gros qu'une dinde, mais on se débrouillera."

La vieille dit : "Moi je ne vais pas venir les mains vides, les dindes, je les vends, je suis toute seule, je n'ai pas l'occasion d'en manger. Pour une fois que je peux en manger une. Tiens prends la dinde qui est là."

Quand il a vu que ça marchait bien, il est allé chez le jardinier pour avoir des légumes, chez le pâtissier pour avoir des gâteaux, chez l'épicier pour l'assaisonnement....
Ce qui fait que le soir, ils étaient au moins quinze à table, et il y avait un magnifique repas. Ils se régalaient.

Au milieu du repas, il y en a un qui a dit : "Ce matin tu nous as dit que tu nous invitais à manger ton riz, mais où est ton riz ?

"Ah le riz...J'ai oublié de le mettre dans la casserole. De toute façon vous n'avez pas raté grand chose."

Il a pris le grain de riz, il leur a montré, raconté l'histoire, et eux, ils ont bien ri !

Livre "Contes gourmands" d'Alain Gaussel